Nothing is impossibleAssis sur son fauteuil, son bureau était impeccablement rangé. Un peu maniaque sur les bords, Hunter ne laissait que rarement des dossiers traîner. Il savait que s'il avait le malheur de se laisser déborder, il n'aurait plus le courage de tout remettre en ordre après. Devant lui, se trouvaient uniquement un seul dossier ouvert, un mug de café fumant, un encrier avec une plume et une photo de sa fille en sa compagnie. Lavinia est son point d'ancrage. La seule chose qui l'empêche de réellement devenir un monstre. Mais aussi la raison de son acharnement sur ce dossier. La gosse dont il était question, n'avait que quelques années de plus que sa propre enfant. Et s'il s'agissait de sa petite rouquine de fille, Hunter ferait n'importe quoi pour lui sauver la vie. Il comptait bien, en faire autant avec cette gamine. D'autant que la patiente n'est pas inconnue de son service, puisqu'elle y est tombée lors de la Nuit Rouge. C'est même l'une des meilleurs médicomages de Shafiq, qui s'est occupée de cette jeune fille. Une fois encore, sa vie dépendait des Sorciers de cet hôpital. Mais cette fois, le cas étant plus délicat que des blessures physiques et mentales, le chef de service a décidé de s'en occuper personnellement. L'étudiante s'était faite agressée en plein centre de Londres, par d'autres Sorciers ayant été mis en fuite par le mage qui l'a aussitôt conduite à Sainte Mangouste. Certains sorts utilisés ont fait de nombreux dégâts, certains irrémédiables, enfin dans la logique des choses.
Calé dans les deux types de magie, qu'il s'agisse de la noire ou de la blanche, Hunter ne connaissait aucun sort capable d'apaiser sa patiente. Quelques potions pourraient rendre sa vie moins pénible et douloureuse, mais rien qui ne pourrait lui rajouter quelques jours au compteur. Il avait étudié tous ses grimoires, ceux écris de sa main, tout comme ceux qu'il a hérité des plus grands médicomages du continent. Mais rien ne pouvait lui venir en aide, si bien, qu'il avait fini par se servir de la technologie moldu – chose qu'il a horreur de faire – afin de voir si ces gens n'avaient pas déjà rencontré le cas. L'idée n'avait pas germé d'elle-même dans son esprit, c'était l'une de ses médicomages qui lui avait soufflé cette hypothèse. Chose qu'il avait mal pris, voyant la médicomagie beaucoup plus avancée que la médecine moldu. Mais face à l'évidence, il s'était ravisé et avait pris l'option. Au moins, si ça capote, il pourra vraiment dire, qu'il a tout envisagé pour sauver cette fille, mais que rien n'aurait pu lui rendre un semblant d'existence plus paisible.
Après de longues heures de recherche, l'homme n'ayant que très peu dormi, avait fini par trouver un petit quelque chose, qui pourrait peut-être être la clé de cette énigme. Dans des cas comme celui-ci, les moldus font des greffes et des transfusions. Ces techniques, plus son savoir dans le monde de la magie et de la médicomagie, pourront largement la sauver. Encore faut-il parvenir à obtenir l'autorisation de cette patiente. Même si Hunter a l'habitude de prendre des décisions, sans même demander l'avis des autres, encore moins des personnes qu'il soigne, cette fois, c'était différent. Si elle ne lui communiquait pas des noms, il se retrouvera vite pieds et poings liés, sans même pouvoir la sauver. Juste la regarder mourir et éventuellement, la bourrer de potions pour apaiser ses souffrances. Heureusement que c'est un bon négociateur, sinon, la partie serait perdue d'avance.
Choppant une blouse à l'entrée de son bureau, il l'enfila par-dessus son tee-shirt sombre et son jean's, sans même la fermer et quitta la pièce. Il traversa le long couloir, s'arrêtant non loin de ses collègues pour prendre des nouvelles de sa patiente, puis se décida enfin à se rendre jusqu'à sa chambre. Celle-ci se trouvait tout au bout, dans un coin plutôt tranquille. Il lui fallait du calme après tout. Après avoir frappé un coup à la porte, Hunter entra dans la chambre sans pour autant avoir attendu de recevoir l'autorisation pour. Là dessus, les Médicomages et les Médecins ont pas mal de points en commun.
« Bonsoir Solweig. »
Il referma la porte derrière lui, traversa la pièce pour s'asseoir sur le bord du lit de la jeune femme. Son regard se colla aussitôt à la fenêtre, où émanaient déjà les premiers rayons du soleil.
« Il fait déjà jour, c'est dingue ce que le temps passe vite. »
Sur le dossier de cette fille, il y a passé une bonne partie de la journée précédente et quasiment toute la nuit. Mais au moins, ce n'est pas avec de plates excuses qu'il se ramène. Il a des idées pour lui venir en aide, mais sans un peu d'informations, il n'arrivera à rien du tout.
« Je sais comment te sauver, mais il va falloir que tu coopères un peu. Dans ton dossier, tu as mis Ljungstrom en tant que nom de naissance. Nous savons tous les deux que c'est faux. Mais étrangement, ton précédent dossier s'est volatilisé. »
Il planta son regard dans le sien, voyant bien la fatigue de la jeune femme. Fatigue ou peut-être aussi douleur et quelque part, c'est pour ça qu'il voulait tant la sauver. Conscient qu'elle a vécu l'enfer, Hunter veut espérer lui donner l'occasion de vivre une bonne fois pour toute, sans avoir à la bourrer de potions pour la soulager.
Nothing is impossibleEn prenant la parole, dans la chambre de la jeune Solweig, il s'était douté que la tâche ne serait pas facile. Trouver le bon remède revenait à lui faire cracher le morceau sur une partie de sa vie, qu'elle semblait avoir voulue effacer. La preuve en était par ce nom, qu'elle portait mais qui n'était pas celui que ses parents lui avaient donné à sa naissance. Mais si elle ne coopérait pas rien qu'un peu, Hunter ne pourrait rien faire. Il peut être très doué, mais s'il n'a pas les armes en main, il ne peut pas faire des miracles.
"Pourtant, s'il y a un moyen de te sauver la vie, il va falloir faire appel à celui qui te fait autant honte."
Le temps ne jouait pas en leur faveur et Hunter se devait de se montrer direct dans ses propos. L'homme ignorait ce que cette fille avait enduré par le passé, mais ce qu'il savait, c'est que ses jours étaient comptés. Il n'aime pas rester sur un échec, alors il compte bien sauver l'existence de cette sorcière qui le mérite sûrement plus qu'elle ne le pense. Mais le Médicomage ne s'attendait pas à une telle révélation. Toute la famille de cette gamine était morte de la main de son propre père. Pourtant, ce n'était pas ce détail qui allait le stopper dans son choix que de la soigner. Il comptait même s'en servir.
"Quoiqu'il en soit, tu peux te venger à ta manière. Sers-toi de lui pour rester en vie."
L'histoire continuait et plus Solweig lui donnait des détails, plus il avait l'impression de se trouver dans la quatrième dimension. Il cachait bien ce qu'il ressentait en cet instant. Lui-même père d'une adolescente, il ne comprenait pas comment on pouvait en venir à faire autant de mal à ses propres enfants. Mais il se tut à ce sujet, l'idée n'était pas de la plaindre ou encore de lui faire changer d'avis, mais de la sauver. Rien de plus. La sauver, Hunter ne veut absolument rien d'autre.
"Il doit pourtant y avoir un moyen. Laisse-moi gérer. Si c'est un échec, au moins j'aurai la satisfaction d'avoir tout essayé pour te sauver la vie."
Ce n'est pas son genre de s'impliquer dans les histoires de famille des autres, mais parler d'homme à homme, voir de père à père, peut-être que ça portera ses fruits. Même si Shafiq n'est pas un tendre, ni même un ange -n'oublions pas qu'il a tué sa dernière épouse-, il a tout de même tout un tas d'arguments en sa possession, pour prouver par A plus B, que son plan peut fonctionner pratiquement comme sur des roulettes. En plus, la jeune Solweig ne semblait pas avoir envie de mourir, sinon elle ne poserait pas toutes ces questions sur le temps qu'il lui reste ou encore, s'il existe un moyen de prolonger sa survie. Que dire si ce n'est la réalité ? Hunter n'est pas homme à tourner autour du pot dans tous les cas.
"Une ou deux semaines. Il est difficile de donner une date à la fin. Quant à un moyen de prolonger ce qu'il te reste, dans l'état actuel des choses, je n'en connais pas. Je peux juste te procurer de quoi amoindrir les douleurs que tu ressens ou que tu vas bientôt ressentir, mais...me retourner ? Oui, bien sûr."
C'était la demande la plus stupide du monde pour un Médicomage. Le corps humain n'a aucun secret pour lui, mais il n'allait pas rester à l'observer pendant qu'elle se retrouvait à moitié nue devant lui. Naturellement, il s'était retourné, bien qu'il ait levé les yeux au ciel. Si elle savait le nombre de femmes qu'il a vu nues, elle ne lui aurait sûrement pas demandé cela. C'est un toubib alors il en a vu des vertes et des pas mûres. Des jolies, des vieilles, des grosses, des trop maigres, des montées de travers, de tout pour faire un monde.
"Rejoins-moi dans mon bureau si tu veux bien. Je te donnerai un traitement pour que tu ne souffres pas."
Il quitta la chambre, sans un regard pour la fille, ne voulant pas la mettre mal à l'aise et partit l'attendre dans son bureau, la porte restant ouverte pour l'inciter à entrer dés qu'elle approchera.