Alice mit un point final à sa déco en posant fièrement une petite plante verte sur le rebord de la fenêtre. Puis elle écarta les mains et pivota sur ses talons pour regarder la chambre dans son ensemble. Eh bien, voilà qui était pas mal du tout.
Elle avait dégagé les vieux draps du lit pour les remplacer par quelque chose de plus moderne de couleur blanche, ajouté plein de coussins pour qu’il y ait une petite touche de couleur, posé un cadre au mur, un tapis tout doux et tout moelleux parterre, disposé des livres de façon stratégique sur l’étagère à côté d’une boîte à bijoux, et elle avait accroché un grand miroir sur la porte de la penderie (à l’aide de la magie, bien sûr, il ne fallait pas lui demander de porter quelque chose) parce qu’il était indispensable de pouvoir se contempler au moment de choisir une tenue. La dite penderie était d’ailleurs pleine à craquer, au point où Alice avait pris d’office une autre étagère de la chambre pour y poser des piles de vêtements, sans demander à sa colocataire si elle en avait besoin. D’ailleurs, toutes les paires de chaussures qu’elle avait aligné contre le mur débordaient clairement sur le côté de la chambre qui appartenait à Nina, mais autant dire que là aussi, elle n’avait rien demandé avant d’installer ses affaires.
Il y a peu, les Dissidents menés par leur leader avaient libéré Poudlard de l’emprise des mangemorts. Alice faisait justement partie du groupe qui avait accompagné Grindelwald et elle avait failli applaudir comme une groupie lorsqu’il avait tué sans sourciller tous les mangemorts qui se dressaient sur son chemin. Il faut dire que Gellert avait une sacré classe. Depuis, le château était à nouveau dirigé par Albus Dumbledore, pour le plus grand bonheur de la plupart des élèves. Alice, elle, était complètement indifférente à ce sujet car elle n’avait jamais été fan de ce vieux croulant que tous les jeunes adulaient de façon vraiment étrange quand on y réfléchissait, mais il faut dire que c’était toujours mieux que Voldemort ou même Hikkins.
Et puis la grande nouveauté, c’est que l’université magique déménageait ses locaux au sein même de Poudlard. Voilà pourquoi Alice se trouvait là, à décorer une petite chambre de la tour nord comme si elle se croyait dans une émission de déco moldue. Elle avait décidé de suivre des études de journalisme, parce qu’elle s’imaginait bien devenir rédactrice vedette de la Gazette plus tard. Rita Skeeter commençait à se faire vieille, autant qu’elle soit remplacée par une blonde plus jeune et plus jolie. Alice avait donc décidé de loger dans une des chambres étudiantes aménagées dans le château, qu’elle n’occuperait que la semaine pour ses cours puisqu’elle retournerait chez Doyle le week-end. Avant de venir ici pour cette première semaine, elle avait tellement passé son temps à couvrir son homme de baisers et à lui affirmer qu’il allait lui manquer que Doyle devait probablement être soulagé qu’elle s’absente en semaine.
Alice se mit à lorgner sur le lit de Nina, se demandant si elle pouvait abuser au point de balancer des coussins dessus histoire que ça harmonise la chambre. Elle finit par se décider pour le oui et ce fut au moment où elle s’emparait d’un des dits coussins que la porte de la chambre s’ouvrit sur Nina qui arrivait.
« Ah Nina, tu es là ! »
Il y avait tellement d’emphase dans sa voix que c’était à se demander pourquoi elle n’avait pas plutôt décidé de suivre des études de théâtre, un peu comme la façon qu’elle eut de jeter nonchalamment le coussin sur son lit comme si elle n’avait jamais eu l’intention d’envahir l’espace de sa colocataire.
Lorsqu’elles avaient découvert toutes les deux qu’elles étaient tombées dans la même chambre, les deux jeunes femmes avaient dû faire exactement la même tête. Il faut dire qu’Alice n’avait pas du tout envisagé le fait de partager une chambre un jour avec Nina Lupin, élève lycanthrope de son année qu’elle avait malmené durant leurs années à Poudlard. A l’époque meilleure amie avec Kaysa Potter et Alexander Black avec qui Alice ne s’entendait absolument pas, autant dire que Nina et elle n’avaient jamais été de grandes amies, bien au contraire. L’ironie du sort avait fait en sorte qu’aujourd’hui, elles suivent les mêmes cours et partagent la même chambre.
Quelques jours étaient déjà passés depuis leur installation mais elles avaient fait en sorte de s’éviter jusqu’ici. Seulement, il faudrait bien qu’à un moment ou à un autre, elles se parlent un minimum. N’ayant aucun problème avec ça, Alice commença à monologuer, rejetant ses cheveux en arrière tout en observant la chambre :
« Sympa la déco, hein ? Je sais, ça ne ressemblait à rien avant, donc je n’ai pas tant de mérite que ça. Mais merci quand même. Tu peux te servir de mon miroir bien sûr et pas touche à ma plante. »
Indifférente au fait qu’il n’y ait aucun sens dans cette dernière phrase, Alice se laissa tomber sur son lit en position assise et s’empara d’un magazine qu’elle avait ramené. Alors qu’elle le feuilletait négligemment, elle interrogea distraitement Nina sans même relever les yeux :
« Tu sors avec Munter à ce qu’il paraît ? Enfin le frère aîné, pas le plus jeune, c’est ça ? Même si je t’aurais plutôt imaginée avec quelqu’un comme lui. Non pas à cause de votre énorme point commun en rapport avec la pleine lune mais je ne sais pas, ce côté je ne parle pas beaucoup et j’ai tendance à rester muet tu vois. Comme quoi, les goûts de chacun, ça peut surprendre. Après, Hengist a clairement un grain dans sa tête donc je pense que c’est la même chose pour Munter mais si ça te plaît c’est le principal, j’imagine. »
Alice était sortie avec Hengist, le demi-frère d’Anton, alors qu’ils étaient tous deux élèves à Poudlard. Depuis leur séparation, tout était prétexte à s’en foutre sur la gueule, au point où c’était probablement devenu leur façon de bien s’entendre.